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Dans le cadre de la pandémie de COVID-19, les greffes fécales ont été interrompues à l’Hôpital Saint-Antoine (France), à la suite de la décision de l’ANSM (mars 2020). Il s’agissait, dans un premier temps, d’éviter toute contamination par le SARS-COV-2, lors d’un transfert de matière fécale. Lorsque les greffes ont repris (fin d’année 2020), un dispositif strict de contrôle était mis en place afin d’éliminer tout risque de contamination par le virus (en particulier: tests nasopharyngés et de selles chez les donneurs). On a en effet constaté la présence du virus dans le tube digestif et dans les selles. Le Sars-COV-2 infecte les cellules du tractus digestif et entraine des symptômes digestifs. Il se reproduit de façon très active dans les entérocytes (Nat Med 2020 Jul;26:1077–1083 ; Sci Immunol 2020 May 13;5(47):eabc3582). Cependant, il n’y a pas eu d’essais pour vérifier si un transfert de matière fécale pouvait entrainer une contamination. 

D’autre part, le rôle du microbiote dans les défenses immunitaires est reconnu lors d’une infection, comme par exemple la grippe,  il s’agit donc, aussi, de mieux identifier le rôle du microbiote intestinal dans le cas du COVID-19.  Une étude sur la modification du microbiote intestinal lors d’une infection par le SARS-COV-2 souligne des différences entre personnes saines et malades ( https://www.gastrojournal.org/article/S0016-5085(21)02976-0/fulltext?referrer=https%3A%2F%2Fcrossmark.crossref.org%2F, Gut Microbiome Composition Is Associated with COVID-19 Disease Severity). Les personnes malades présentent des modifications de leur flore intestinale d’autant plus importantes que leur COVID est sévère. Il apparait aussi que la dysbiose observée lors de la maladie persiste après l’élimination du virus. D’après les auteurs, il serait donc intéressant de suivre l’évolution du microbiote et de l’analyser pour évaluer si cette persistance peut, par exemple, expliquer un COVID Long.

Un autre élément à apporter à la discussion est le fait que les personnes en surpoids et obèses développent des pathologies plus sévères. Or, ces personnes ont, pour la plupart, un microbiote déjà en déséquilibre. Il y aurait donc plusieurs raisons de penser qu’il y a des liens entre le microbiome et la sévérité de la maladie.

Cependant, la question est ouverte de savoir à quel point, les modifications du microbiote intestinal sont une conséquence de la maladie et du dérèglement immunitaire et/ou à la source de l’inflammation. D’après V. Sencio et al. (Mucosal Immunology (2021) 14:296–304;  https://doi.org/10.1038/s41385-020-00361-8),  la composition et les fonctions du microbiote intestinal peuvent être profondément affectées par de nombreuses infections virales (virus influenza, Virus Respiratoire Syncytial (RSV), coronavirus sont passés en revue) et ces changements peuvent encore aggraver la sévérité de la maladie. Chez les patients présentant une infection élevée au COVID19, on a pu observer une plus grande abondance de pathogènes opportunistes (Collinsella aerofaciens, Collinsella tanakaei, Streptococcus infantis, Morganella morganii  https://gut.bmj.com/content/70/2/276 ) et chez les patients avec un niveau d’infection plus bas, les selles présentaient une plus grande abondance de bactéries productrices de tryptophane et d’AGCC ( Acides Gras à Chaine Courte) qui ont un effet antiviral protecteur.

Au vu de ces quelques remarques, il apparait essentiel d’étendre l’étude du microbiote intestinal en cas d’infection virale, en particulier au SARS-COV-2.

Avec l’axe cerveau-intestin, l’étude de l’axe poumon-intestin est un autre défi tout autant prometteur (voir sur ce site https://www.immuscience.org/comment-le-microbiote-intestinal-influence-t-il-notre-cerveau/)